Un démarrage difficile pour 2025
L’année avait débuté sous le signe d’un optimisme prudent chez les acteurs du marché des grands vins, avec l’espoir d’un rebond porté par une campagne Bordeaux 2024 réussie et des marchés américains et asiatiques actifs. Cependant, l’annonce en mars de tarifs douaniers américains de 200% a provoqué un retrait brutal des acheteurs américains, qui soutenaient jusque-là des régions moins liquides telles que le Piémont, le Rhône et l’Espagne, freinant le marché et laissant chaque maillon de la chaîne d’approvisionnement en difficulté.
Le Liv-ex Fine Wine 100 a chuté de 4,4% au S1 2025, à 311,6, dépassant la baisse anticipée de 1,9%, illustrant un marché plus instable qu’espéré. Bien que certains millésimes montrent des signes de stabilisation, l’incertitude demeure dominante.
Comparaison avec les marchés financiers
Les marchés financiers traditionnels ont également connu des secousses au S1 2025, mais leur capacité de rebond a été plus rapide grâce à une atténuation des tensions géopolitiques. En comparaison, le Fine Wine 100 a sous-performé la plupart des indices, ne faisant mieux que le pétrole brut.
Impact des devises
La baisse du dollar américain face à la livre sterling a réduit les opportunités d’arbitrage pour les acheteurs américains, contribuant à leur retrait. En parallèle, l’euro s’est renforcé face à la livre, compliquant davantage la campagne En Primeur bordelaise, nécessitant des baisses de prix agressives pour maintenir la compétitivité des sorties dans la chaîne mondiale.
Performance des sous-indices Liv-ex 1000
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Bordeaux 500 : plus mauvais indice avec une baisse de 5,6% YTD.
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Bordeaux Legends 40 : baisse plus contenue à 2,6% grâce aux millésimes matures, tandis que les 2020, 2021 et 2022 atteignent souvent des plus bas historiques.
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Italy 100 : une stabilité apparente jusqu’à Q1 avant une baisse de 3,4% au Q2, avec une dichotomie nette :
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Super Toscans (Tignanello, Sassicaia, Solaia…) : -1,3% seulement, soutenus par leur notoriété.
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Piémont (Gaja, Giacomo Conterno…) : -5,6%, amplifié par le retrait des acheteurs américains au Q2.
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Analyses techniques : Bordeaux Legends 40 vs. Bordeaux 500
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Bordeaux Legends 40 :
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En appui sur un support critique (pic de 2011).
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Volatilité en baisse, divergence haussière naissante.
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Ex : Petrus 2009, passé de £30,000 à £35,000/caisses 12×75, illustrant un ralentissement de la tendance baissière.
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Bordeaux 500 :
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Peu de supports solides.
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Déclins rapides post-release des récents millésimes.
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Les 2022 s’échangent parfois déjà sous les prix ex-château, laissant prévoir de nouvelles baisses possibles.
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Dynamique des échanges
Malgré la baisse des prix, les volumes échangés ont augmenté de 11,9% et la valeur de 4,2% par rapport au S2 2024. Toutefois, cette dynamique s’est essoufflée après avril, les niveaux restant inférieurs à ceux précédant les annonces tarifaires.
En termes de régions :
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Bordeaux a gagné en part de marché sur H1 2025.
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Champagne a été plus volatile.
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Les acheteurs asiatiques sont revenus prudemment, représentant environ 18% des volumes hebdomadaires en Q2, tandis que les acheteurs américains ont fortement reculé, leur retour étant conditionné par la clarification des politiques tarifaires.
Vins les plus échangés au S1 2025
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Château Lafite Rothschild 2021 : vin le plus échangé, passé de £5,800 à £3,800, illustrant le réalignement des prix à des niveaux jugés attractifs par le marché.
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Château Mouton Rothschild 2021 et Château Lynch-Bages 2021 ont également figuré parmi les plus échangés, démontrant que les 2021 offrent des planchers de prix réalistes, attirant de nouveau les acheteurs.
Perspectives pour le second semestre 2025
Les espoirs d’un rebond au S2 2025 sont tempérés par la déception du Q2. Toutefois, à mesure que les prix reculent, le marché s’approche potentiellement d’un plancher. Comme l’ont montré les Bordeaux 2021, la demande existe lorsque les prix sont réalistes, permettant des stabilisations progressives.
Un retour de la confiance nécessitera :
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Une clarification durable sur les politiques tarifaires américaines.
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Un éventuel catalyseur, tel qu’un regain d’appétit des acheteurs asiatiques ou des ventes forcées de stocks, pour relancer véritablement le marché.
Conclusion
Le premier semestre 2025 a mis en lumière un marché des grands vins sous pression, avec des écarts notables entre régions, des millésimes récents en difficulté, mais également des signes encourageants sur les millésimes matures et des retours prudents des acheteurs asiatiques. La prudence reste de mise, mais le marché semble se rapprocher de niveaux où les opportunités pourront se présenter pour les investisseurs et amateurs éclairés.